YASHIMA MAGAZINE : SHU HA RI 守破離 – APPRENTISSAGE ET PERFECTIONNEMENT

Un maître zen reçut un jour la visite d’un homme souhaitant étudier avec lui. Soucieux de découvrir son interlocuteur, il l’invita à boire le thé. Le visiteur dont la fierté n’avait d’égale que son orgueil, lui exposa sa vie. De son cheminement spirituel à ses réflexions, sans oublier de citer les nombreux maîtres qu’il avait côtoyés, il s’égara dans un long monologue où il n’était question que de lui.
Absorbé par la curiosité que lui suscitait un tel individu, le maître écouta avec patience, profitant de l’occasion pour lui servir une nouvelle tasse de thé. Lentement, le liquide encore chaud remplit le récipient puis finit par déborder. Le thé s’écoula sur la table jusqu’à atteindre le parquet où était assis le visiteur. L’événement déclencha sa colère et il s’écria : « Mais que faites-vous ?! Ma tasse est déjà pleine ! ».
Le maître lui répondit alors avec calme et courtoisie : « Monsieur, comment voulez-vous qu’un enseignement pénètre votre esprit alors qu’il est déjà plein comme cette tasse ? »

Vouloir et recevoir un enseignement sont deux choses bien distinctes. Si on associe régulièrement ce récit à la notion de shoshin, l’esprit du débutant, il met également en exergue l’importance des notions que sont l’humilité et l’ouverture pour apprendre puis polir nos connaissances et compétences.
Fil conducteur d’une compréhension profonde, cet état d’esprit est au cœur du concept shu ha ri 守破離 dont l’origine est attribuée au maître de thé Sen no Rikyū千利休. Et l’interprétation contemporaine du précepte shu ha ri, qui divise l’apprentissage en trois grandes étapes – la période de l’imitation, celle de la rupture ou de l’exploration puis celle de la libération ou de la maîtrise – pose nombres de questions.
Nous nous construisons par l’imitation avant d’explorer les possibles que nous offrent nos acquis, pour enfin trouver une forme d’autonomie et de maîtrise. Mais ces concepts sont-ils réellement scindés dans notre apprentissage ? N’y a-t-il pas une part de chacun d’entre eux à chaque étape de notre évolution ? Peut-on réellement dire que nous cessons un jour d’imiter ? Que nous ne maitrisons rien avant l’étape finale ? Ou encore que l’exploration n’est pas un processus présent dès le début ? Au final, que signifient réellement les notions de maîtrise et de libération de l’adepte ?
Dans ce numéro de Yashima, disponible en kiosque, cinq experts nous proposent leurs réflexions, parfois à contre-courant, nous livrant de riches pistes de réflexions sur nos apprentissages et notre progression.

Abonnez-vous au premier magazine sur la Culture et les Arts martiaux japonais!
